# 341 Liv Maria, Julia Kerninon

Sous mon sapin, il y avait aussi Liv Maria, un livre qui m'a intriguée lors de sa présentation à la rentrée littéraire organisée par la médiathèque et la librairie Les vraies Richesses : ses lecteurs étaient divisés et de fait, le roman n'a pas gagné sa place pour la sélection finale.

J'en profite pour vous inviter à voter pour le lauréat du prix Piaf, de mon côté il me reste quelques semaines pour lire Fille de Camille Laurens et Arène de Négar Djavadi avant de faire mon choix.

Mais revenons au dernier roman de Julia Kerninon qui retrace la vie trépidante de Liv Maria jusqu'à ses 40 ans. D'une île bretonne à Berlin, du Chili à l'Irlande : on suit les mouvements géographiques de la jeune femme, miroir de ses bouleversements intérieurs et de sa vie amoureuse. La narration à la troisième personne met un peu de distance mais nous fait accepter les coïncidences et les rebondissements à la manière d'un conte tant le message au fil des pages se dessine clairement. Nous avons beau fuir, nous sommes la somme de nos expériences et de notre passé et seuls nous avons connaissance de ce qui nous structure profondément. Contre cela il est inutile de se battre, nous pouvons simplement réparer ce qui s'est brisé, un jour, en nous, et donner à la notion d'intimité son sens étymologique : en latin intimus est le superlatif d'intérieur.

L'écriture parfois un peu abrupte de Julia Kerninon rythmée par des fulgurances poétiques donne au personnage une certaine modernité féministe et ce destin de femme m'a captivée, peut-être parce que je crois profondément que l'on peut vivre mille vies, d'une façon ou d'une autre et que rien n'est jamais figé. Choisir de rester ou de partir : une certaine définition de la liberté.

« Ça a à voir avec moi, avec la personne que je suis à l'intérieur. Ce sont mes histoires. Et il aimait aussi les filles qui étaient des histoires, même si elles ne le savaient pas, celles qui avaient des histoires à raconter, c'était ça qui le séduisait en premier. »

« Alors quand son épouse lui faisait des reproches, il lui répondait silencieusement dans sa tête : Ecoute. Je suis le fils d'une femme merveilleuse qui m'a dit un jour Je t'aime, je reviens bientôt, et qui n'est jamais revenue. Parfois je ne pense pas qu'il soit nécessaire d'ajouter quelque chose. »

« Nous avons si souvent l'impression que nos mots ne sont pas à la hauteur de ce que nous voudrions vraiment dire, pensait Liv Maria, que nous oublions que c'est parfois l'exact inverse qui se produit - que dans la multitude des phrases que nous prononçons, certaines sont plus exactes, plus précises, plus judicieuses que nous ne pouvons le deviner. »