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30 septembre 2022

# 408 Le Trésorier-payeur, Yannick Haenel

Laëtitia m'a offert Le Trésorier-Payeur en précisant que c'était Philippe, notre libraire, qui le lui avait conseillé en lui assurant qu'il me plairait. Le résumé qu'il lui en avait fait l'avait séduite - notamment, me précise-t-elle parce que le livre contenait des passages assez débridés. 

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Je lève tout de suite le suspense: c'est un des meilleurs livres que j'ai lus ces derniers mois. Il est tout simplement brillant par son érudition et par sa construction narrative. La première partie nous dévoile la naissance du livre: invité à participer à l'inauguration d'une exposition consacrée à l'écrivain Georges Bataille dans ce qui fut une des succursales de la Banque de France à Bethune, Yannick Haenel apprend l'existence d'un homonyme, le Trésorier Bataille, dont la demeure communiquait par un passage secret à la salle des coffres de l'établissement. Les soixante pages de son basculement de la réalité vers la fiction et de la façon dont le roman s'impose à l'auteur sont si bien écrites que cela pourrait constituer un roman en soi. 

On entre ensuite dans la vie de ce Bataille que rien ne prédestinait à une carrière financière. Etudiant en philosophie, suite au hasard d'un stage à la Banque de France, il se passionne pour l'économie, une science dont le fondement est selon lui son antonyme: la dépense. Tout en s'occupant des surendettés, cette théorie de la dépense se diffuse à tous les niveaux de sa vie et particulièrement son expérience amoureuse. Le don de soi "sans compter", l'exact opposé du métier de banquier, mais aussi à contrecourant d'une société qui veut tout rationaliser, tout chiffrer. L'écriture poétique sert avec brio cette éloge de la rêverie et de l'utopie. 

La prouesse narrative tient à ce que ce personnage est le miroir de la pensée de l'écrivain Georges Bataille, que je ne connaissais pas. De l'anecdote de la grotte de Lascaux à l'incarnation du sacré que l'on retrouve notamment dans les personnages féminins, Yannick Haenel nous offre une sorte de mise en abyme continue vertigineuse. 

En complément de cette lecture, je vous conseille l'émission de France Inter L'heure bleue : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/l-heure-bleue/l-heure-bleue-du-jeudi-22-septembre-2022-6090409

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