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14 novembre 2019

# 279 La panthère des neiges, Sylvain Tesson

Difficile de lire ces dernières semaines : à chaque fois, son souvenir me submergeait, je posais mon livre et je rêvais éveillée à elle, à sa façon d'être toujours là dès que je lisais, et les larmes montaient invariablement. J'en ai parlé plusieurs fois ici, ce chat m'a toujours accompagnée dans la lecture, c'était un rituel profondément ancré, d'ailleurs David nous prenait souvent en photo tellement c'était étonnant. Mimi, c'est surtout 16 ans de ma vie, son départ représente aussi ça, les pages qui se sont tournées et l'effondrement des certitudes que l'on peut avoir à 24 ans.

Mon chagrin vous paraitra certainement ridicule, mais dire au revoir à ce chat en lui tenant la papatte pendant son endormissement final a été une réelle épreuve pour moi. Et puis au fil des jours, un phénomène assez touchant s'est produit: Zeus a réinventé un cérémonial : il vient sur moi dès que je prends ma liseuse et réclame ses cinq minutes de grattouilles puis il s'endort contre mes jambes. Ce chat me guérit de tant de choses.

Pour retrouver le goût de lire, un seul remède, un récit de félin: La panthère des neiges.  Il faut dire qu'il est écrit par Sylvain Tesson qui est en grande partie responsable de mon addiction à la Russie.

L'auteur suit son ami photographe animalier Vincent Munier dans le Tibet à la rencontre de la panthère des neiges. Apprendre l'attente pour l'écrivain voyageur: un défi. 

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Au final, 176 pages lumineuses qui nous invitent à regarder la beauté du monde. Une suite parfaite à son roman Dans les forêts de Sibérie où déjà en 2011, la nature (et la vodka) apaisait ses blessures. Son processus d'écriture transparaît aussi entre les lignes, l'autodérision n'est jamais bien loin et le résultat se révèle d'une poésie profonde.

"Avec Munier, je commençais à saisir que la contemplation des bêtes vous projette devant votre reflet inversé. Les animaux incarnent la volupté, la liberté,  l'autonomie : ce à quoi nous avons renoncé."

"L'homme brûlait de faire ce qu'il redoutait, aspirait à transgresser ce qu'il venait de bâtir, rêvait d'aventures une fois rentré chez lui mais pleurait Pénélope dès qu'il naviguait. Capable de tous les embarquements possibles, il se condamnait à n'être jamais content. Il rêvait de l'"en même temps". Mais l'"en même temps" n'est pas biologiquement possible, ni psychologiquement souhaitable, ni politiquement tenable."

"Chercher des coupables occupait le temps et économisait l'introspection.

Mais je n'avais rien à consoler puisque j'avais croisé le beau visage de l'esprit des pierres. Son image, glissée sous mes paupières, vivait en moi. Quand je fermais les yeux, je voyais sa face de chat hautain, ses traits plissés vers un museau délicat et terrible. J'avais vu la panthère, j'avais volé le feu. Je portais en moi le tison.

J'avais appris que la patience était une vertu suprême, la plus élégante et la plus oubliée. Elle aidait à aimer le monde avant de prétendre le transformer. Elle invitait à s'asseoir devant la scène, à jouir du spectacle, fût-il un frémissement de feuille. La patience était la révérence de l'homme à ce qui était donné."

 

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