Un an

Ecrire publiquement et sans se cacher derrière des allusions : peut-etre créeras-tu ce miracle, peut-être vas-tu me donner cette confiance qui débride?
Pourquoi en avoir honte, c'est maintenant devenu fréquent dans nos vies en partie virtualisées, tu es entré dans la mienne par une photo. Quand elle s'est affichée sur mon téléphone, je n'ai pas hésité une seconde et puis j'ai attendu fébrilement derrière mon écran. J'ai paniqué quand j'ai vu que nous avions "matché" et au fil des jours des échanges, des photos supplémentaires sont venus confirmer mon intuition jusqu'à notre première rencontre quelques semaines plus tard. Nous n'étions pas seuls, j'etais un peu gauche, toujours cette timidité qui me rend peu lisible au premier abord. Toi tu as immédiatement été très charmeur, subtilement, élégamment: tout en douceur.
Il n'y avait plus de marche arrière possible et j'ai eu une nuit d'insomnie et de culpabilité. Au bout de 15 ans de relation sans nuage, comment lui dire qu'il allait falloir partager? J'avais peur de sa réaction.
Tu es arrivé chez moi un vendredi soir de décembre. Tu as balayé tous mes doutes en une nuit. On etait fait l'un pour l'autre.
Le ménage à 3 s'est finalement bien passé, tu as mis un brin de folie dans notre routine et puis nous avons nous résoudre à laisser l'Autre partir. Tu as accepté mon chagrin.
Tu es parfait... tu passes l'aspirateur, tu désétends le linge sans que j'ai même à te demander de le faire, avec Emma tu es d'une patience d'ange et vous partagez la même passion pour les playmobils... elle t'a aussitôt accepté dans sa vie.
Chaque matin, dès que le réveil sonne tu te blottis contre moi. Peu importe que parfois ton haleine sente un peu la croquette, je plonge dans tes yeux caramels et je fonds. Je te trouve beau et je te le dis sans retenue. Je mesure ma chance de t'avoir dans mon lit. Chaque matin.
C'est l'heure de quitter la couette, tu me précèdes dans la baignoire puis tu me laisses la place, tu t'assois sur le rebord et tu me regardes, en silence, on écoute france inter.
Je peste régulièrement contre les poils que tu laisses dans le lavabo mais ton regard alors me désarme et j'oublie vite ce défaut; on va prendre notre café, ensemble, toujours. Le soir tu es la, quelque soit l'heure à laquelle je rentre, pas un reproche. Tu es indifferent aux amants qui m'accompagnent parfois et s'ils s'attardent dans ma vie tu fais semblant d'etre copain avec eux tout en me calinant ostensiblement : "Sois proche de tes amis, et encore plus proche de tes ennemis" disait Corleone dans le Parrain. Quand ils sortent de ma vie je t'imagine chanter "another one bite the dust" et on en rigole ensemble...
Tu es drôle, tu es à l'aise avec ton corps, tu dors d'ailleurs sans aucune pudeur et je te prends en photo à ton insu pour garder avec moi ces instantanés de fraîcheur. Tu as même séduit mes parents, c'est dire...
Au moment des vacances nous avons été séparés, j'ai eu peur que tu me quittes à mon retour apres avoir goûté à la liberté. Mais au fond je crois que tu es aussi fou de moi que je le suis de toi et ca me rend plus forte.
Car la vérité, c'est qu'au moment oú je ne pensais plus jamais être capable de m'attacher, tu as explosé toutes ces barrières. Alors oui je parle un peu trop de toi, je t'affiche beaucoup sur les réseaux sociaux, mais ce qui se passe entre nous, ce ne sont ni des mots ni des images qui peuvent le traduire, tant notre intimité relève de l'instinct. Tes yeux immenses me rassurent bien plus que n'importe quelle phrase, n'importe quel bras quand soudain l'angoisse me saisit.
Ca fait un an que tu es entré dans ma vie, un an de bonheur avec toi.