# 328 Born to run, Né pour courir, Christopher Mcdougall
Marie a longtemps insisté pour que je lise Born to run (également recommandé par Mathieu dans les commentaires de ce post) et elle a fini par me l'offrir.
(Je lui fais vraiment faire n'importe quoi à ce chat...)
En essayant de comprendre pourquoi il se blesse systématiquement lors de ses footings, le journaliste Christopher Mcdougall dessine un essai très intéressant sur la course minimaliste. A travers ses investigations et l'histoire de l'ultratrail, il nous emmène à la rencontre des Tarahumaras, un peuple qui vit à l'écart de notre marche du monde dans les canyons du nord du Mexique et dont la pratique de la course à pied revêt un caractère culturel et social sacré.
De vulgarisations scientifiques sur le fonctionnement de notre corps en stratégies marketing des firmes sportives, l'auteur nous interroge sur notre rapport au corps. Ceux qui ne connaissent pas le souffle, la respiration et la liberté que procurent les sports d'endurance n'y trouveront peut-être aucun sens. Une nouvelle fois, le très beau texte de Christophe Ono-Dit- Biot trotte dans ma tête.
Si la danse me permet de me réconcilier avec la légèreté, la pratique de la course à pied est, elle, le reflet de mon intranquilité. Il est de certaines lectures comme des rencontres, elles s'imposent parfois à nous. Au moment où j'aspirais à retrouver l'insouciance perdue avec le confinement et à échapper à l'enfermement que l'absence de voyage provoque désormais sur moi, je suis prête à invoquer les dieux des Tarahumaras pour qu'enfin les démons de la remise en question se barrent de ma vie!
Quand je chausse mes baskets c'est comme si j'etais face à une feuille blanche et au fil des kilomètres, je déroule dans ma tête les mots et les maux; j'ai écrit des dizaines de débuts de roman et réglé pas mal de comptes, j'ai pris des décisions, j'ai pleuré, je suis tombée, je me suis dépassée. J'ai couru seule, à deux, à plusieurs. C'est là que j'ai réalisé qu'on se parlait souvent mieux côte à côte plutôt que face à face: comme si accorder sa cadence était déjà une écoute de l'autre. "Nous ne courons pas pour nous mesurer les uns aux autres, avait-il réalisé, mais pour être les uns avec les autres".
J'ai lu ce livre en apnée, dans l'attente de la réponse au pourquoi je cours qui s'esquisse entre les lignes: ce serait un réflexe ancestral. Si vous refusez de croire que vous êtes né pour courir, vous niez non seulement l'histoire, mais aussi ce que vous êtes". J'avale en ce moment des semis chaque dimanche: j'espère qu'avoir rejoint récemment le groupe d'ultra-trailers lecteurs (!) n'est pas une simple coïncidence mais un signe que je prends le bon chemin, celui du sourire, de la légèreté et de la poésie.
P.209:
Quant à l'inspiration, c'est Charles Bukowski qu'ils invoquaient:
"Si tu as l'intention d'essayer, va jusqu'au bout
Il n'y a pas de sensation pareille
Tu seras seul avec les dieux
Et le feu incendiera tes nuits"
P.215
- Je ne l'ai jamais dit à personne parce que ça a l'air prétentieux, mais j'ai commencé à courir des ultras pour devenir quelqu'un de bien, me confia-t-elle. Je me disais que, si on est capable de courir 100 miles, c'est qu'on est zen, qu'on peut être un putain de Boudha qui apporte la paix et la joie au monde. Ca n'a pas marché pour moi. Je suis toujours la même punkette de merde, mais il y a toujours l'espoir de faire de toi ce que tu veux être, une personne meilleure et apaisée. Quand je cours sur une longue distance, poursuivit-elle, la seule chose qui compte c'est de finir la course. Mon cerveau ne fait pas blehblehbleh comme d'habitude. Tout s'apaise et la seule chose qui compte c'est le mouvement pur. Il n'y a que moi et le mouvement. C'est ce que j'aime, courir dans les bois comme une barbare."